Romain Poite, arbitre engagé, revient sur son expérience en Coupe du Monde de rugby

Arbitre international de rugby, Romain Poite parraine Rebonds! depuis de nombreuses années. Il intervient auprès des jeunes bénéficiaires du Suivi Rebonds! et permet à certains d’entre eux de l’accompagner sur des matchs de TOP 14, afin qu’ils découvrent le métier d’arbitre professionnel, avant, pendant et après les rencontres.
A travers cette interview, il revient pour nous sur son expérience en Coupe du Monde de rugby au Japon.

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Pouvez-vous nous raconter comment vous avez vécu cette nouvelle expérience en Coupe du Monde au Japon à l’automne 2019 ?
Avant tout, c’est déjà un privilège de pouvoir participer à un évènement comme celui-ci, qui regroupe les meilleurs joueurs et les meilleures équipes du Monde. Dans un deuxième temps, c’est surtout l’aboutissement d’un travail de quatre années puisque c’est un processus assez long pour être sélectionné et qui s’accélère dans les deux dernières années mais cela reflète un peu le niveau de performance que l’on peut avoir sur ces quatre années au niveau international, européen et national.

Vous ne parlez pas uniquement de vous là mais également de tous ceux qui ont été sélectionnés pour faire partie de l’aventure avec vous ?
Oui, parce-que l’on existe aussi à travers les autres. C’est la validation du travail que l’on a fait de mise en action d’une équipe, qui nous permet de nous tirer vers le haut les uns les autres et de nous améliorer après chaque rencontre.

Comment vous-êtes-vous préparé physiquement et mentalement à cette échéance ?
D’un point de vue physique, c’est vrai que les exigences de préparation de saison, puisque pour nous cela correspond avec le début d’une saison, sont plus élevées. On a un préparateur physique qui nous suit, qui nous prépare des programmes qui sont forcément un peu plus durs qu’à l’accoutumée. On élève les requis et les exigences par rapport à la dimension physique pour justement être plus dans l’entretien durant la compétition que véritablement dans la préparation. Il faut arriver début septembre, presque à l’apogée de sa condition physique donc évidemment il y a deux mois qui sont assez difficiles et pas forcément avec une grosse coupure pendant l’été.
Mentalement, c’est aussi une continuité et l’expérience nous permet d’améliorer ce vecteur-là. C’était ma troisième Coupe du Monde donc j’ai su comment m’y préparer mais on sait aussi que les attentes sont plus élevées en termes de performances techniques donc on se nourrit encore un peu plus de rugby et puis de ce que l’on a pu faire auparavant. A l’intérieur de la compétition, on a beaucoup d’échanges puisque l’on a la facilité de vivre tous ensemble et puis on prend un petit peu de chacun dans les approches mentales.

Quelle saveur particulière cette 3ème Coupe du Monde a eu pour vous ?
Disons que la première Coupe du Monde à laquelle j’ai participé en 2011, c’était plutôt une découverte, avec un ranking qui ne me permettait pas d’accéder à plus que des matchs de poules. En 2015, cela a été un peu pareil mais avec un peu plus d’expérience donc j’avais des objectifs qui étaient plus élevés, notamment être désigné arbitre central pour les phases finales, mais que je n’ai pas pu atteindre pour diverses raisons. Pour 2019, j’ai repoussé encore un peu plus mes objectifs et j’avais vraiment une volonté d’être le plus performant possible pour être sélectionné jusqu’au bout. Pour ma part, je l’ai été en tant qu’arbitre assistant sur toutes les phases finales mais bien sûr, j’aurais aimé participé à une rencontre en tant qu’arbitre central. Malheureusement, il y a beaucoup de paramètres qui rentrent en compte pour les désignations : techniques, géopolitiques, etc. Après, le fait d’être impliqué jusqu’à la fin et de pouvoir accéder à des désignations même si ce n’est pas toujours pour être au centre, c’est un point positif.
Cette troisième Coupe du Monde reste forcément un bon souvenir et je me donne le droit de pouvoir penser à la prochaine et si le corps le permet d’essayer d’atteindre une fois pour toutes, mes objectifs.

Quel est votre plus beau souvenir de cet évènement ?
C’est un souvenir humain car le Japon est un pays que l’on a découvert et dont on n’avait pas forcément une bonne connaissance. C’est presque de la déformation professionnelle, mais c’est un pays très ordonné.
Sinon sportivement, il y a toujours un gros match en poule et chaque fois de grandes émotions donc personnellement je retiens le match Pays de Galles / Australie que j’ai eu la chance de diriger avec un petit peu de réussite. Il restera mon meilleur souvenir avec évidemment la finale que l’on a partagée tous ensemble avec Jérôme Garcès qui mettait fin à sa carrière sur ce match.

Avez-vous un rituel particulier avant les matchs ?
J’aime bien arriver très tôt dans les vestiaires et puis commencer ma routine, ma préparation. On est suivi par un préparateur physique international tout au long de l’année et particulièrement pendant deux mois sur place donc on met toujours en place de nouveaux processus. Je prends le temps, je ressens l’atmosphère, je profite du moment pour bien me préparer car si l’on se sent en confiance physiquement, cela va forcément impacter la prestation technique sur le terrain et notre facilité à aborder le match. Ensuite, on se projette une fois que l’on est dehors sur des situations de matchs ou sur des éléments que l’on a pu relever lors des analyses préparatoires à la vidéo. On essaye de se préparer à des situations qui peuvent devenir complexes mais déjà d’y penser, cela nous permet d’anticiper et de savoir comment on peut réagir.


unnamed (2)Jusqu’à quel âge pouvez-vous arbitrer sur la scène internationale ?
Il y a un âge limite dans le championnat français qui est de 45 ans. Au-delà de cette année, normalement, nos contrats prennent fin mais dès lors que l’on est sélectionné au niveau international, ils sont prolongés. Je devrais donc être dans ce cas à partir de septembre 2021 puisque j’ai eu des entretiens avec les dirigeants internationaux qui étaient favorables à ce que je poursuive ma carrière tant que je peux répondre aux exigences physiques et de performance. Pour l’instant, je ne me fixe pas de limite puisque je prends encore beaucoup de plaisir à faire ce que je fais et que j’ai l’opportunité de pouvoir continuer et de maintenir mon niveau.

Quelles sont vos perspectives pour le futur ?
Evidemment, j’ai des objectifs à court terme qui sont de remplir mes performances de la meilleure des façons au niveau français, européen avec une sélection pour une finale de Coupe d’Europe et continuer à être présent régulièrement sur les phases finales. Au niveau international, il y a deux grosses échéances, les Lions en Afrique du Sud. J’ai déjà eu la chance de faire l’Australie et la Nouvelle-Zélande. A plus long terme, ce serait me donner l’opportunité d’être sélectionné à nouveau pour la Coupe du Monde 2023 qui en plus sera en France. Ce serait peut-être une façon de terminer ma carrière à la maison et en apothéose.

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